Nos arbres ont besoin du froid !

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Verger de Ventajols du Parc national des Cévennes, Photo©CBridgens2019

Depuis décembre il neige, il vente, il gèle. On a eu des -5 en plaine, des -10 sur les plateaux. Un hiver normal (du point de vue météo, du moins…) dans nos moyennes montagnes. Et nos jardins, nos vergers ont grand besoin de ce ralentissement saisonnier. Nous allons bientôt entrer dans la période du débourrement, première étape du cycle végétatif des fruitiers : les bourgeons gonflent et laissent apparaître un duvet, la bourre. C’est ce développement et l’ouverture des bourgeons qui signe le réveil de la nature et l’arrivée du printemps tant attendu. 

 

Février est un mois charnière. La luminosité nous dit que ce n’est plus tout à fait l’hiver, et le froid, que ce n’est pas encore le printemps. Mais en sourdine se déroule tout un processus invisible réglé par des hormones végétales (les phytohormones), et principalement les inhibiteurs de croissance. En hiver, les bourgeons passent par deux phases qui sont la dormance et la quiescence. Dès l’automne, le raccourcissement des jours déclenche une forme d’hibernation des végétaux en agissant sur des inhibiteurs de croissance présents dans les écailles des bourgeons. Ils rendent leur développement physiologiquement impossible, même si l’hiver est doux. C’est la dormance. Au cours de l’hiver, le gel et les intempéries suppriment peu à peu ces effets hormonaux. La dormance des bourgeons est levée après une période de froid prolongée.

Sortis de la dormance, les bourgeons passent en phase de quiescence, ce qui signifie que leur développement redevient possible dès que les conditions atmosphériques s’y prêtent. La quiescence est une sorte de demi-sommeil dans l’attente de jours meilleurs.  Dès que la température et la luminosité y sont propices, la sève se remet à circuler, et c’est l’éclosion des bourgeons, des feuilles et des fleurs. Le moment du débourrement varie selon les espèces :  les fruitiers à noyaux (cerisiers, pruniers, pêchers, etc.) sont précoces : un peu de soleil et c’est parti ! Les fruitiers à pépins (pommiers, poiriers …) sont plus frileux. Nos végétaux de l’hémisphère nord ont donc absolument besoin de périodes de froid en hiver pour ne pas démarrer trop tôt, car une fois les bourgeons ouverts, les jeunes feuilles et les fleurs sont très vulnérables aux froidures printanières et aux maladies. Un hiver trop doux suivi d’un débourrement trop précoce expose la floraison aux gelées toujours possibles jusqu’à la mi-mai (les fameux saints de glace). Une fois de plus, le dérèglement climatique peut avoir des effets dramatiques sur l’agriculture…

Le débourrement est donc une période clé pour nos jardins et vergers, et bien sûr pour le jardinier. Aussi, lorsque l’on plante des fruitiers en Lozère, en moyenne montagne, il faut bien choisir les variétés en fonction de leur période de débourrement, et planter impérativement des fruitiers à floraison tardive. 

Et attention, si vous voulez terminer vos tailles d’hiver ou prélever des greffons, il faut le faire bien avant le débourrement … et penser que les déchets de taille peuvent donner de jolis greffons !

 Cécile Bridgens, pour Vergers de Lozère, le 28 février 2021. 

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